Je ne vais pas répéter ce qui a été mieux dit par d’autres sur l’horreur des événements que nous commémorons aujourd’hui. Une horreur minimisée, altérée, presque cachée. Presque cachée parce que face à elle, aucune politique de sécurité qui envisage l’arme nucléaire n’est humainement pensable. 

Cette année ces commémorations prennent place à un moment particulier. Ce moment est particulier, d’abord en raison des tensions immenses que nous observons chaque jour. La volonté de maintenir un monde unipolaire par la première puissance mondiale, les États-Unis d’Amérique, est un danger à la sécurité partout. La lutte pour l’hégémonie mondiale, pour la suprématie militaire et économique, amène le monde à un moment de danger rarement atteint.

A.Gutteres déclarait il y a quelques jours à l’Assemblée Générale des NU que nous avons été extrêmement chanceux jusqu’à présent, mais la chance n’est pas une stratégie. Et la chance n’est pas non plus un bouclier contre les tensions géopolitiques qui risquent de mener à un conflit nucléaire. Aujourd’hui, l’humanité est seulement à une erreur de calcul, une erreur d’appréciation près de l’annihilation”.

Ces moments sont sombres, ils sont angoissants, ils sont difficiles. Même depuis une position relativement confortable comme en Belgique, lutter pour la paix devient un défi quotidien. Car la paix a de nombreux partisans, jusqu’à ce que la guerre toque à la porte, et que médias et politiques répètent la rhétorique belliqueuse qui a pu conduire au pire dans le passé. 

Mais ces commémorations prennent place dans un contexte particulier pour une autre raison, pour quelque chose qui peut, et donc qui doit, nous amener à espérer. Les commémorations coïncident avec le début de la dixième conférence d'examen du traité de non-prolifération nucléaire (TNP) à New York. Ce traité, entré en vigueur en 1970, et signé ou ratifié par la grande majorité des États à travers le monde, a été une victoire du mouvement pacifiste et une victoire de la diplomatie. Outre les questions relatives à l’énergie nucléaire civile, il vise à limiter aussi bien le nombre d’États capables d’utiliser des armes nucléaires, mais également à ce que ceux qui en sont dotés s’engagent à diminuer, et à terme éliminer, leur arsenal nucléaire. 

Il est une victoire et il doit être protégé. Il doit être protégé par tous les citoyens du monde entier partout, en particulier dans les États dotés de l’arme atomique. Et il faut donc lutter pour le protéger, là où on est. Ne pas se contenter de donner des leçons au monde comme l’a fait la Ministre des affaires étrangères allemande à la tribune de l’ONU, accusant tout le monde sauf son pays et ses alliés occidentaux. 

Qu’avons-nous à faire nous en Belgique ? La participation tiède de notre nouvelle ministre des affaires étrangères ne donne pas beaucoup d’enthousiasme, d’autant plus lorsque l’on sait que sa participation a uniquement été une des contreparties à l’augmentation du budget militaire belge. Notre pays, en violation du TNP, héberge et s'entraîne à l’emploi d’armes nucléaires. Cette violation doit être dénoncée, et doit servir de point d’appui à notre mouvement. 

Plus largement au sein du “camp” européen, de l’UE, mais aussi de l’OTAN, nous devons dénoncer  le poids des armes nucléaires, les arsenaux qui sont augmentés partout (notamment en France et au Royaume-Uni) et les investissements les concernant, encore augmentés de plusieurs milliards au détriment de tous les autres besoins de la société. Nous devons nous mobiliser pour le désarmement concrètement, chez nous, et informer un maximum de personnes autour du non-respect du TNP par la Belgique dans le cadre de l’Alliance Atlantique. Au-delà, la Belgique doit s’engager à des accords internationaux plus contraignants, et signer le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, qui en quelques années a déjà été signé ou ratifié par une cinquantaine de pays.

 

Cette campagne elle est menée par la pétition nonukes.be, qui demande à la Belgique de cesser d’abriter des armes atomiques sur son sol. La façon de mener ces combats, l’analyse et la stratégie à avoir, tout cela doit être débattu en permanence entre nous, et avec Intal nous espérons avoir l’occasion de le faire ensemble, notamment à Manifiesta mi-septembre, où de nombreux ateliers et débats couvrent ces thématiques.